Avec le Green Deal, le secteur des transports devra réduire radicalement ses émissions de CO2. En général, on pense dans la direction du camion électrique pour atteindre cet objectif. Cependant, il existe déjà aujourd’hui une solution : le biodiesel HVO, qui est produit à partir de déchets. Il permet de réduire les émissions de CO2 de près de 90 % par rapport au diesel “fossile”. Certaines entreprises utilisent déjà le HVO. La commune de Bornem a elle aussi opté pour cette solution. Le seul frein aujourd’hui est le prix, qui est nettement plus élevé que celui du diesel fossile. Mais on s’attend à ce que cela change.
L’huile végétale hydro traitée (Hydrotreated Vegetable Oil ou HVO) est un biodiesel de la deuxième génération : il est produit à partir de déchets et de graisses provenant de l’industrie alimentaire (et non de cultures agricoles comme le colza ou l’huile de palme). Actuellement, c’est le carburant le plus durable pour véhicules diesel sur le marché, avec pas moins de 89% d’émissions de CO2, 30% de particules et 9% d’oxydes d’azote en moins par rapport au diesel normal.
Un avantage important de l’HVO est qu’il s’agit d’un produit “drop-in”. « On peut l’utiliser dans presque tous les camions modernes, sans modification du moteur diesel. Un avantage supplémentaire : les intervalles de maintenance restent inchangés. Le HVO peut être utilisé pur ou en mélange avec du diesel fossile. Si le réservoir du camion est vide, on peut faire le plein de diesel ordinaire. La plupart des constructeurs de camions ont déjà approuvé l’utilisation du HVO dans leurs moteurs diesel », dit Michiel Kuijs, directeur général de DAF Trucks Belgique/Luxembourg.
« Proposer du HVO dans nos stations-service est pour nous un moyen de contribuer à la transition vers une mobilité durable et de répondre à la demande de nos clients en carburants non-fossiles. Avec le HVO, les principaux problèmes de pollution sont déjà résolus. Cela donne un nouvel avenir au moteur diesel », précise Dirk Maes, PDG de Maes Energy & Mobility. Ce distributeur de carburants a récemment ouvert deux stations-service HVO, à Londerzeel et Puurs.
Un intérêt croissant
« Maes Energy & Mobility” livre déjà du HVO en vrac à quelques transporteurs tels que Snel Logistic Solutions à Deinze et Tailormade à Gand et Ghlin (voir plus loin). Nous constatons que l’intérêt pour ce carburant augmente parmi les transporteurs, entre autres parce que de plus en plus de leurs clients attendent d’eux qu’ils réduisent leurs émissions de CO2. Le gaz naturel – CNG et LNG – permet une réduction relativement faible des émissions, mais c’est une technologie coûteuse. Les camions électriques sont encore peu nombreux actuellement et leur poids et leur autonomie limitent les applications. Avec le HVO, les transporteurs peuvent atteindre leurs objectifs environnementaux sans avoir à investir dans de la technologie », ajoute Hans Van Dam, business development manager.
« Nous proposons désormais du HVO dans nos deux stations-service pour camions à Londerzeel et Puurs. À mesure que la demande augmentera, nous proposerons également ce biodiesel dans quinze de nos autres stations-service. Cette croissance pourrait être plus rapide que prévu : les sociétés de services “last mile”, entre autres, sont intéressées par l’utilisation du HVO dans leurs camionnettes et camions légers », dit encore Hans Van Dam.
Le prix va baisser
Le plus grand obstacle à un passage plus large du diesel fossile au HVO est son prix. « En Belgique, le HVO est aujourd’hui 70 % plus cher que le diesel. Il y a trois raisons principales à cela : la production de biodiesel à partir de déchets est actuellement plus coûteuse que celle à partir de pétrole brut ; dans le nord-ouest de l’Europe, il n’y a qu’un seul producteur, de sorte qu’il n’y a pratiquement pas de concurrence ; et – contrairement aux Pays-Bas, par exemple – il n’y a pas de mesures de soutien fiscal dans notre pays. Mais nous nous attendons à ce que le prix baisse. À mesure que la demande augmentera, de plus en plus de producteurs de carburant se montreront intéressés. La production augmentera et la concurrence se renforcera », ajoute Hans Van Dam.
Stimulation fiscale
Selon Dirk Maes, la Belgique pourrait adapter la taxation sur les carburants afin de stimuler le HVO. « Cela aiderait notre pays à atteindre ses objectifs climatiques. Je ne vois toutefois pas le gouvernement réduire les droits d’accises, car il y diminuerait alors ses revenus fiscaux. Je comprends cela. C’est pourquoi nous formulons une proposition visant à promouvoir le HVO de manière neutre sur le plan budgétaire, par le biais du “diesel professionnel”. Aujourd’hui, les transporteurs se voient rembourser une partie des droits d’accises. On pourrait imaginer une formule qui réduirait le remboursement pour le diesel fossile et l’augmenterait pour le HVO. Avec une telle formule, ce serait une opération neutre pour l’État mais une grande amélioration pour le climat et l’environnement », dit-il.
« Si la différence de prix n’était plus de 70% mais de 20 ou 30%, le mouvement pourrait s’accélérer fortement », ajoute Hans Van Dam. Malgré le handicap du prix, certaines entreprises passent toutefois déjà au HVO par souci de protection de l’environnement.
Snel Logistic Solutions
Le pionnier du HVO en Belgique est Snel Logistic Solutions à Deinze. L’entreprise a commencé à l’utiliser dès 2018 et a déjà 400.000 litres au compteur. « En tant que transporteur, nous nous devons de travailler de manière plus durable. Le HVO est le moyen idéal de réduire les émissions de CO2 dues au transport. C’est beaucoup plus pratique que le gaz et l’électricité”, déclare Gert Snel, son dirigeant. “Près de 20 % de notre flotte fonctionne aujourd’hui au HVO, à partir de notre filiale à Weert aux Pays-Bas il est vrai. Aux Pays-Bas, il y a en effet beaucoup de stations-service proposant ce carburant. En Belgique, elles sont pour l’instant bien moins nombreuses, de sorte que les coûts de détour ont un effet dissuasif. Le fait que Maes propose désormais du HVO à Puurs et à Londerzeel ouvre des perspectives pour notre entreprise. Bientôt, certains de nos camions rouleront eux aussi au HVO en Belgique ».
Selon Gert Snel, la différence de prix est difficile à répercuter intégralement sur les clients. « En organisant les transports différemment et de manière optimisée, on peut déjà éliminer partiellement ce problème. Mais c’est surtout une question de mentalité : en combinant la maximisation écologique et la maximisation économique, vous rendez votre entreprise durable. Cela présente à son tour des avantages : vous attirez de meilleurs collaborateurs et, au final, cela se traduit par de meilleurs contrats ».
Tailormade Logistics
Depuis une bonne année, Tailormade Logistics de Gand utilise le HVO pour une grande partie de ses transports. L’entreprise a même investi dans ses propres pompes HVO sur ses sites à Gand et à Ghlin (près de Mons). « Cinquante de nos quatre cents camions roulent aujourd’hui au HVO. C’est beaucoup plus que ce nous avions prévu à l’origine : au début, de nombreux clients hésitaient à s’engager avec nous dans l’aventure du HVO – la crise sanitaire les a rendus plus prudents – mais aujourd’hui, je constate que leur conscience environnementale s’accroît. La durabilité est de plus en plus au centre de leurs préoccupations », dit son dirigeant, Bert Vandecaveye.
Dans les circonstances actuelles, il voit surtout des applications dans la distribution urbaine. « Bien que le coût du HVO ait baissé de 30 % en un an, il y a encore en Belgique un supplément de prix considérable par rapport au diesel. Dans la distribution urbaine et les transports locaux, la part du carburant dans le prix de revient est proportionnellement faible. Il est donc plus facile de trouver des clients dans la distribution qui sont prêts à payer un peu plus cher pour un transport respectueux de l’environnement que dans le transport international. Dans ce dernier, le coût du carburant pèse sensiblement plus lourd », estime-t-il.
Duvel Moortgat
Duvel Logistics, la branche logistique de la brasserie Duvel Moortgat, a elle aussi adopté le HVO. « Depuis l’ouverture de la station-service HVO de Maes à Londerzeel, nos six camions de distribution y font le plein. Même nos quatre camions les plus vieux roulent eux aussi au HVO », dit Luk Renmans, responsable de la logistique.
“Duvel Moortgat fait des efforts importants dans le domaine de l’environnement et des émissions de CO2. Par exemple, nous utilisons la navigation intérieure pour certains de nos transports et nous évitons autant que possible de rouler à vide ou avec une charge incomplète. Nous envisageons d’utiliser des camions électriques, mais le HVO nous offre la possibilité d’agir dès aujourd’hui. Il nous permet de transporter de manière écologique sans avoir à investir dans de la technologie”, explique Luk Renmans.
Distrilog, Van Dievel et Roefs
Plusieurs autres entreprises ont saisi l’occasion que leur offre l’ouverture par Maes des stations-service pour HVO à Puurs et Londerzeel. Elle aussi adoptent progressivement ce biodiesel. Distrilog (distribution), Van Dievel (transport) et Roefs Group (nettoyage industriel) utilisent désormais également le HVO. Cette dernière société applique la philosophie “Lean & Green” et l’échelle de performance CO2 dans le cadre de l’entrepreneuriat durable. « L’une des initiatives prises par Roefs est l’utilisation du HVO comme carburant pour nos véhicules. Et ce qui est fantastique, c’est qu’il y a maintenant une station-service de Maes juste à côté de notre site à Puurs », dit l’entreprise.
Commune de Bornem
Il n’y a pas que les entreprises qui font le pas. La commune de Bornem vient elle aussi de décider d’opter pleinement pour le HVO. Nicole Van Praet, échevin de l’environnement (IedereenBornem) : « Notre nouveau camion DAF roulera uniquement au HVO. À cette fin, nous installerons un réservoir sur le terrain du service technique de la commune. Nous examinons également si nos camions les plus anciens sont compatibles, le cas échéant en mélangeant du HVO avec du diesel traditionnel. Mais nous nous engageons pleinement car avec cette solution, nous pouvons réduire de manière drastique nos émissions de CO2. Le fait que le HVO soit produit à partir de déchets rend ce carburant encore plus attrayant, car il permet de boucler la boucle », dit-elle. « Bien que Bornem soit une commune assez étendue, nos camions parcourent peu de kilomètres. Le coût supplémentaire du HVO ne joue dès lors qu’un rôle minime. Nous avons calculé que la facture de carburant est supérieure d’à peine 1.250 euros par an. C’est un petit prix à payer pour une réduction drastique des émissions de CO2 et de particules fines, et donc pour le climat et un air plus sain ».
Stefaan De Landtsheer, échevin de l’économie locale (IedereenBornem) la rejoint : « Avec cette décision, la commune de Bornem donne un signal clair. J’espère que les PME qui ne roulent pas beaucoup de kilomètres feront le même exercice que nous. Sans avoir à investir dans de la technologie, elles peuvent aujourd’hui déjà atteindre presque le même impact environnemental qu’avec un camion électrique. J’espère dès lors que Maes proposera bientôt du HVO dans sa station-service de Bornem, afin qu’elles puissent suivre notre exemple ».
La meilleure alternative au diesel
Tous les utilisateurs s’accordent à dire que, technologiquement parlant, le HVO est une alternative fiable à 100% au diesel. “C’est un produit fantastique. Aucun camion n’a jamais eu de problème avec le HVO. La consommation est même légèrement inférieure”, déclare Gert Snel. “Tant que la conduite électrique n’est pas abordable et que les piles à combustible restent une solution pour l’avenir, le HVO est le moyen idéal de concilier écologie et économie”, conclut Bert Vandecaveye.
Info – www.daf.be